Le saut de l'ange.

Aujourd’hui, il a décidé d’offrir un bouquet de fleurs à son épouse. Ils se sont quittés fâchés ce matin. Il veut se faire pardonner.

Depuis quelques temps, il ne se sentait plus aimé, désiré.
Cette nuit, il s’était approché d’elle, doucement, sa main avait glissé le long de son ventre.
Elle l’avait repoussé, en grognant et s’était un peu éloignée de lui.
Il l’aimait encore, il n’insista pas, la lune était brillante comme une pièce d’argent et il se souvenait..
Des images le submergeaient, belles photos, son âme frémissait aux caresses du passé, aux baisers envolés.
Il monta les escaliers rapidement, il n’aspirait qu’à un peu de bonheur, retrouver les sensations effacées.
Il était prêt à tout pour sauver son couple, même se damner, se renier, mettre de côté les vexations.
Ne pas être submergé, se noyer à tout jamais dans les abysses de la mélancolie.
Il tourna la clef dans la serrure, doucement, il voulait la surprendre, bousculer le quotidien. Lui tendre comme un amoureux transi ce bouquet multicolore. Qui sait ? Elle sera touchée en plein cœur, peut-être feront ils l’amour comme aux premiers temps avec fougue.
Les voyageurs rouspètent, encore des retards, ils rient nerveusement, ils se doutent que cette attente sera longue. Accident de voyageur, c’est toujours laborieux.
Il ignorait à quel point la douleur serait terrible. Ses os qui se broient, son corps qui s’écrase, cette mort brutale, douloureuse, un aller simple vers les ténèbres.
La dernière image qu’il voit, son bouquet de fleurs sur le sol, sa femme nue sur leur lit et cet inconnu.
Il ne s’aime plus lui-même, se sent indigne, nul, il pourrait hurler, arracher de leur couche cet homme, il n’en fait rien. Il larmoie comme un gamin, jette son cadeau.
Il se sent mal, si mal, il comprend, enfin, pourquoi, à chaque fois, elle lui échappait.
Il claque la porte, et descend en sanglotant les marches qui le conduisent, dehors.
Les gens le regardent, il est comme un gamin, perdu, Il est un moins que rien.
Elle a été sidérée, affolée, elle ne l’attendait pas si tôt, son mari. Où avait-il pu aller ? Son amant s’était rhabillé honteux, s’excusant avec maladresse, trop tard, elle voyait son monde s’effriter puis s’écrouler.
Le plus terrible dans cette situation, c’est qu’elle l’aimait encore son époux. Mais leur passion n’avait plus le goût des premiers jours.
Le téléphone retentit, elle savait confusément que cet appel allait lui apporter une bien triste nouvelle.
Sur le rebord du lit, elle s’apitoie, pendant que dans un train, les gens râlent, ils arriveront très tard chez eux ce soir, sans savoir qui était cet inconnu qui avait mis fin à ses jours et les avait contrariés.
Protégé Copyright © 2014 Ricardo SANTIAGO