Les lamentations de Ricardo 1....

Les lamentations de Ricardo 1....

Artiste maudit, je me gargarise.

Certains sur leur carte de visite indiquent "écrivain". Pour être au niveau, j'informe direct sans filet : Artiste maudit.

Chez moi, les textes inachevés s'accumulent, ils gisent, épars, sur les dalles (Béatrice) en plastique de mon bureau qui vacille sous les poids des ramettes de papier. 

Je fume, picole, snife, m'ouvre les veines.

Ça pisse le sang sur les murs blancs.

Peut-être devrais-je indiquer simplement "écrivain" et peut-être ne serais-je pas tenté de m'enfiler de la javel.

Quoique, la javel, pour terrasser le coronavirus, c'est radical.

Allez ! Encore un paquet de gitanes, de gauloises, un ou deux litres de javel et ensuite j'arrête les âneries.

J'entre dans le moule confortable de l'écrivain. 

Clean, propre sur lui, qui sirote de l'Evian en tapant sur son clavier.

Plus de prostitués roumaines en fin de vie ou de masseuses asiatiques.

L'écrivain qui tient debout tout seul, celui qui jongle avec des quilles, grimpe sur un cheval et fait le tour de la piste de ce cirque.

Je tousse, c'est le brouillard à la maison, quarante cigarettes, les dernières fumées.

J'ouvre la fenêtre, respire un bon coup.

Une nouvelle vie commence, un nouveau cycle, un nouveau roman....

Mince, je n'en ai jamais écrit un seul.

Pas grave, je vais pondre une ou deux petites histoires que je mettrai sur FB. Ça fera l'affaire si je pleurniche bien.

Si je dépasse les vingt "likes", je me lance pour l'édition papier. Sinon ?

J'ai une cartouche de cigarettes sur mon étagère et plusieurs litres de javel à m'enfiler.

Ricardo Santiago le 08 juin 2020