Un songe

On n’est pas à l’aise dans cette armure, l’épée pèse des kilos. Mais il est nécessaire de me protéger.

Le cheval ploie sous mon poids (une rime, une !).

Le pauvre animal a bien du mal à filer sur les routes escarpées et je n’ai guère fière allure malgré mon panache blanc.

Mais le devoir m’appelle, je dois sauver la princesse dans sa tour. Chaque jour, elle se fane, fleur fragile qui jamais ne voit la lumière.

J’arrive en haut de la montagne, mon destrier s’effondre en tirant la langue.

Avec une démarche de robot cop, je m’approche de la tour qui chatouille les étoiles.

Surgit de je ne sais où un démon ailé que je n’ai point hélé, il crache du feu, il me plonge dans les ténèbres avec ses immenses ailes, je fais tourbillonner mon glaive pour ne pas succomber.

J’éventre la bête qui pousse un cri déchirant et s’éloigne sous un ciel écarlate.

Avec mon fléau, je démolis la porte du château.

Je grimpe un immense escalier de pierres, 102 marches, 3000 marches, je vais mourir d’épuisement.

Mais d’où sortent tous ces poncifs ?

Une nouvelle porte au sommet, je frappe mollement, dans l’état dans lequel je me trouve, je suis bien incapable de briser quoi que ce soit.

Un grincement, elle apparaît.

Je retire mon heaume, je lui souris bêtement. J’ai les cheveux un peu humides de sueur, ça me donne un côté séducteur.

Elle m’embrasse, un frisson me parcoure. L’après-midi est moins rude désormais.

J’emprunte le chemin de ses courbes et je respire le parfum de sa peau.

La nuit étend son habit sombre.

Je me saisis de sa main, elle comprend que je souhaite l’emmener avec moi mais elle refuse en m’offrant une mine pathétique.

Elle m’explique que sa vie est ici, qu’elle ne veut pas partir. Dans sa cage d’or même si elle est malheureuse, elle ne se sent pas le courage de fuir.

Je comprends qu’il est vain de tenter de la convaincre.

Mon cheval m’attend, en haut la belle m’observe. Elle finira ses jours, là-haut. Dans son « Paradis ».

Ricardo SANTIAGO, 21 septembre 2013